BBM CANADA(AUTREFOIS BBM BUREAU OF MEASUREMENT) c. SA MAJESTÉ LA REINE,
Dossier : 2005-472(IT)G
ENTRE :
BBM CANADA
(AUTREFOIS BBM BUREAU OF MEASUREMENT),
appelante,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]
____________________________________________________________________
Appel entendu les 19 et 20 novembre 2007, à Toronto (Ontario).
Devant : L’honorable juge Patrick Boyle
Comparutions :
Avocats de l’appelante : Me J. Gregory Richards
Me D. Keith Laushway
Me Nikiforos Iatrou
Avocat de l’intimée : Me André LeBlanc
____________________________________________________________________
JUGEMENT
L’appel est accueilli avec dépens et la nouvelle cotisation est annulée.
Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de juin 2008.
« Patrick Boyle »
Juge Boyle
Traduction certifiée conforme
ce 27e jour de février 2009.
Mario Lagacé, jurilinguisteRéférence : 2008CCI341
Date : 20080613
Dossier : 2005-472(IT)G
ENTRE :
BBM CANADA
(AUTREFOIS BBM BUREAU OF MEASUREMENT),
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,
appelante,
intimé.
[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]
MOTIFS DU JUGEMENT
Le juge Boyle
[1] Il s’agit en l’espèce de savoir si l’appelante est une entité à but non lucratif
qui est exonérée d’impôt en vertu de la partie I de la Loi de l’impôt sur le revenu.
[2] L’appelante est une société sans capital-actions établie en vue de fournir à
ses membres des données impartiales et exactes concernant les cotes d’écoute. Les
membres votants sont des télédiffuseurs et des radiodiffuseurs canadiens, des
agences de publicité et des annonceurs représentatifs. Le groupe des membres non
votants est composé d’autres entités qui veulent avoir accès aux données en
question. Le revenu de l’appelante est presque entièrement tiré des frais payés par
ses membres. Les frais d’abonnement sont fixés à l’avance selon une formule de
recouvrement des coûts en fonction du budget annuel dressé pour l’année à venir.
Tous les excédents réalisés grâce au rendement réel obtenu au cours de l’année ou
prévus au budget étaient raisonnables quant au montant eu égard aux
circonstances, et ils étaient utilisés ou conservés à des fins liées aux activités de
l’appelante. Aucun revenu de l’appelante n’était directement ou indirectement
distribué à ses membres ou disponible en vue d’être distribué à ses membres.
[3] Le paragraphe qui précède résume les faits cruciaux dont l’appelante et
l’intimé ont convenu. Les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir si
l’appelante est une entité à but non lucratif exonérée d’impôt visée àPage : 2
l’alinéa 149(1)l) de la Loi de l’impôt sur le revenu. L’Agence du revenu du Canada
(l’« ARC ») a établi une nouvelle cotisation à l’égard de l’année d’imposition 1996
de l’appelante en vue de refuser cette exonération.
[4] Plus précisément, la seule question en litige entre les parties est de savoir si
BBM Canada (« BBM ») était constituée et administrée uniquement « pour [...]
exercer toute autre activité non lucrative ». Avant l’audience, l’ARC et la
Couronne étaient également d’avis (i) que les excédents de l’appelante étaient, au
cours de la période en question, beaucoup trop élevés et qu’ils démontraient donc
l’existence d’une fin lucrative non déclarée de l’appelante, et (ii) que certains
montants avaient été indirectement distribués à au moins l’un des membres de
l’appelante. Toutefois, la Couronne a abandonné ces deux arguments au complet
au début de l’instruction. La position de la Couronne est simplement qu’une
organisation ne peut pas être considérée comme étant constituée et administrée
uniquement pour exercer une activité non lucrative si la constitution ou les
activités de l’entité sont liées aux activités commerciales ou d’entreprise de ses
membres ou d’autres personnes. Ce n’est pas ainsi que cette disposition a été
appliquée (par l’ARC et par les tribunaux) jusqu’à ce jour. Dans ses observations
écrites, la Couronne dit qu’il est maintenant temps pour la Cour de reconnaître une
telle exigence objective.
I. La législation
[5] L’alinéa 149(1)l) est rédigé en ces termes :
149(1) Aucun impôt n’est payable en
vertu de la présente partie, sur le
revenu imposable d’une personne,
pour la période où cette personne
était :
149(1) No tax is payable under this
Part on the taxable income of a
person for a period when that person
was
[…]
[…]
Organisations à but non lucratif
Non-profit organizations
l) un cercle ou une association qui, de
l’avis du ministre, n’était pas un
organisme de bienfaisance au sens du
paragraphe 149.1(1) et qui est
constitué et administré uniquement
pour s’assurer du bien-être social, des
améliorations locales, s’occuper des
(l) a club, society or association that,
in the opinion of the Minister, was
not a charity within the meaning
assigned by subsection 149.1(1) and
that was organized and operated
exclusively for social welfare, civic
improvement, pleasure or recreationloisirs ou fournir des divertissements,
ou exercer toute autre activité non
lucrative, et dont aucun revenu n’était
payable à un propriétaire, un membre
ou un actionnaire, ou ne pouvait par
ailleurs servir au profit personnel de
ceux-ci, sauf si le propriétaire, le
membre ou l’actionnaire était un
cercle ou une association dont le but
premier et la fonction étaient de
promouvoir le sport amateur au
Canada;
Page : 3
or for any other purpose except
profit, no part of the income of which
was payable to, or was otherwise
available for the personal benefit of,
any proprietor, member or
shareholder thereof unless the
proprietor, member or shareholder
was a club, society or association the
primary purpose and function of
which was the promotion of amateur
athletics in Canada;
[6] Les versions française et anglaise de l’alinéa 149(1)l) sont différentes en ce
sens que la version française n’utilise plus expressément la notion de « fins » et
n’emploie pas le mot « but »; toutefois, les parties s’entendaient pour dire que la
version française « [...] qui est constitué et administré uniquement pour [...] exercer
toute autre activité non lucrative... » correspond implicitement à la version anglaise
« ... organized and operated exclusively... for any other purpose except profit... ».
Le mot « but » figure dans les notes marginales de la version française. Je suis
d’accord avec les parties lorsqu’elles affirment qu’il n’y a pas d’incohérence ou de
différence pertinentes entre les deux versions de l’alinéa 149(1)l).
[7] L’exonération en cause est initialement apparue à l’alinéa 5g) de la Loi de
l’impôt de guerre sur le revenu de 1917, dont la formulation est pratiquement
identique.
II. Les faits
[8] Au début de l’instruction, les parties ont déposé un exposé conjoint partiel
des faits, dont une copie est jointe à l’appendice accompagnant les présents motifs.
L’appelante a cité deux témoins. Le président-directeur général et le directeur
financier de BBM ont témoigné sur une période de deux jours. En outre, plus de
250 documents ont été produits en preuve.
[9] Le Bureau of Broadcast Measurement a été fondé en 1944. BBM a été
constituée à titre de société fédérale sans capital-actions en 1945 en vue d’exercer
les activités du Bureau of Broadcast Measurement. Comme il en est fait mention
ci-dessous, BBM a été établie par des représentants de l’industrie de la
radiodiffusion et de la télédiffusion avec le concours d’annonceurs et d’agences de
publicité. Avant l’établissement du Bureau of Broadcast Measurement, le secteurPage : 4
canadien de la diffusion faisait face à des affirmations contradictoires ou
incompatibles au sujet du nombre d’auditeurs ou, sur certains marchés, il n’existait
aucun moyen de mesurer le nombre d’auditeurs. BBM a été établie à titre
d’organisme de recherches chargé de fournir à ses membres des estimations
impartiales fiables de grande qualité au sujet des auditeurs. Un grand nombre de
Canadiens connaissent BBM parce que, au fil des ans, ils ont rempli des fiches de
sondage indiquant leurs habitudes réelles d’écoute de la télévision ou de la radio
sur une période d’une semaine ou de plus d’une semaine. Chaque année, des
Canadiens de tout âge partout au pays répondent à des centaines de milliers de
sondages de ce genre. Au cours des dernières années, les cahiers d’écoute pour les
sondages à la télévision ont été remplacés, dans les principales villes canadiennes,
par des appareils de mesure électronique. Les cahiers d’écoute traditionnels sont
encore utilisés dans les centres plus petits et pour les sondages radio. Les
Canadiens participent à ces sondages sur une base volontaire et reçoivent un
montant symbolique de deux ou de cinq dollars en remerciement. BBM recrute des
volontaires dans les centres d’appel qu’elle exploite à Moncton, à Montréal et à
Toronto, qui comptent de 200 à 400 employés à plein temps ou à temps partiel.
[10] L’objet de BBM est énoncé dans ses lettres patentes :
a) concevoir et mener des sondages, recueillir des données statistiques et
autres, procéder à des études du marché et à d’autres études se
rapportant à la radiodiffusion et à la télédiffusion ainsi qu’à d’autres
formes de supports publicitaires, en particulier en ce qui concerne le
nombre de personnes qui écoutent ou peuvent écouter des émissions
des diverses stations de radiodiffusion ou qui regardent ou peuvent
regarder des émissions des diverses stations de télévision ou qui sont
exposées à d’autres formes de supports publicitaires ou qui peuvent
être influencées par d’autres formes de supports publicitaires de temps
en temps, à différents moments, ainsi qu’en ce qui concerne la
distribution et les habitudes d’écoute, de visionnement et de lecture de
pareilles personnes;
b) établir des rapports, des diagrammes et d’autres formes de
renseignements fondés sur des sondages ainsi que des données
statistiques et autres qui sont recueillies comme il en est ci-dessus fait
mention, et les imprimer, les publier et les distribuer aux membres.Page : 5
[11] Les lettres patentes prévoient également ce qui suit :
[TRADUCTION] Il est en outre ordonné et déclaré que les activités de la corporation
seront exercées sans que ses membres en retirent un gain pécuniaire, et que tout
bénéfice ou autre accroissement du revenu de la corporation servira à promouvoir
son objet.
[12] BBM compte diverses catégories de membres, chacune étant représentée
d’une façon équilibrée dans ses structures de gouvernance. Les postes, au sein du
conseil d’administration et des comités d’administration de BBM, sont comblés par
des volontaires parmi ses quelque 600 membres. Les trois catégories de membres
votants de BBM sont les diffuseurs, les annonceurs et les agences de publicité, ces
désignations se passant de commentaires. De plus, il existe une catégorie de
membres associés non votants.
[13] Seuls les membres de BBM ont accès aux renseignements obtenus grâce aux
sondages et aux résultats des sondages effectués par BBM. Les données de BBM
ne sont pas mises en vente ou de quelque autre façon mises à la disposition des
non-membres. Elles sont utilisées par les membres de BBM pour un certain
nombre de fins. Les diffuseurs les utilisent afin de prendre des décisions en matière
de programmation ainsi que des décisions en ce qui concerne la création
d’émissions. Cela comprend les diffuseurs privés et les diffuseurs publics. Les
diffuseurs membres de BBM comprennent des diffuseurs publics non
commerciaux comme la chaîne radiophonique de Radio-Canada, TVO et TVQ.
Les diffuseurs privés utilisent également les données en question pour fixer les prix
de la publicité. Les diffuseurs utilisent en outre les données afin de rendre compte
aux organismes de réglementation de la diffusion comme le Conseil de la diffusion
et des télécommunications canadiennes (le « CRTC ») et de leur prouver qu’ils
satisfont aux exigences de leur permis, ainsi que pour mesurer leur rendement et
leur auditoire cumulé par rapport aux cotes réelles. Les diffuseurs publics utilisent
les données afin d’évaluer la mesure dans laquelle ils s’acquittent de leur mandat,
qui est financé par le public, envers les Canadiens. Ainsi, au cours des dernières
années, les données de BBM ont contribué au retour des informations locales sur la
chaîne radiophonique de Radio-Canada. Les annonceurs et les agences de publicité
utilisent les renseignements pour prendre des décisions en matière de publicité en
ce qui concerne les stations et les prix.
[14] Les membres associés non votants ne sont pas des diffuseurs, des
annonceurs ou des agences de publicité, mais des personnes qui ont besoin d’avoir
accès ou veulent avoir accès aux données de BBM. Ces membres comprennent desPage : 6
ministères et des organismes gouvernementaux, ainsi que des collèges et des
universités. Ainsi, Statistique Canada utilise les données de BBM pour le
Programme de la statistique de la culture et pour ses publications. Le CRTC utilise
les données afin de servir l’intérêt public en s’assurant que les diffuseurs sont
représentatifs du Canada dans son ensemble, ainsi qu’en surveillant l’entrée de
canaux non réglementés du « marché gris ». Le Fonds canadien de télévision
accorde un financement direct en vue d’encourager la création d’émissions
canadiennes et se sert des données de BBM pour vérifier si les émissions réalisées
sont celles que les Canadiens choisissent de regarder. Patrimoine Canada est un
membre associé, probablement pour des raisons similaires. Les universités et
collèges membres veulent être en mesure d’utiliser les données de BBM à des fins
de recherche pédagogique.
[15] Au cours des deux dernières décennies, des entreprises commerciales
compétitives n’ont fait que commencer à procéder à des sondages d’écoute de la
télévision, et ce, uniquement sur certains gros marchés urbains canadiens. Jusqu’à
maintenant, l’industrie de la diffusion canadienne et les autres membres de BBM
ont préféré faire appel à BBM en raison de son approche de fixation de prix
identiques sur tous les marchés, qui va jusqu’à inclure tout marché éloigné où il y a
un diffuseur qui veut obtenir des données de mesure fiables ou qui a besoin de
telles données.
[16] En 1992, BBM a commencé à effectuer des recherches personnalisées à
l’intention des membres et des non-membres. Ces travaux de recherches
personnalisées ont été poursuivis dans le cadre d’un projet visant à tirer parti de ce
qui serait par ailleurs une période d’inactivité pour les centres d’appel. Cette
division a été transférée à une filiale imposable à la fin de l’année 1996. Au cours
de chaque année, jusqu’en 1996, la division avait subi des pertes.
III. Positions des parties
[17] L’appelante affirme remplir toutes les conditions d’exonération énoncées à
l’alinéa 149(1)l), en particulier :
a) De l’avis du ministre, il ne s’agit pas d’un organisme de bienfaisance,
comme en ont convenu les parties;
Aucun revenu de BBM n’est disponible en vue d’être distribué aux
membres, comme en ont également convenu les parties;
b) Page : 7
c) BBM a été constituée et administrée « pour [...] exercer toute autre
activité non lucrative ». L’appelante souligne que l’expression « toute
autre activité non lucrative » est une expression disjonctive par
rapport à la liste d’objets expressément énumérés, par exemple les
« améliorations locales », les « loisirs » et le « bien-être social »
comme le montre la répétition du mot « for » (pour) dans la version
anglaise de l’expression « toute autre activité ». L’appelante maintient
qu’étant donné que cette expression est disjonctive et compte tenu de
l’emploi des mots « toute autre », le membre de phrase en question ne
doit pas être interprété selon la règle ejusdem generis, c’est-à-dire de
manière à s’appliquer uniquement à des types similaires d’objets. La
Couronne est d’accord pour dire que ce membre de phrase doit être
interprété d’une façon disjonctive et qu’il ne doit pas être interprété
selon la règle ejusdem generis. Toutefois, la Couronne ne souscrit pas
à l’avis selon lequel BBM a été constituée ou administrée pour toute
autre activité non lucrative.
[18] L’appelante soutient que l’absence de but lucratif en ce qui concerne
l’établissement et les activités de BBM est évidente compte tenu du fait que BBM
est administrée selon une formule de recouvrement des coûts, et que ses recettes
proviennent des membres.
[19] De plus, BBM accorde beaucoup d’importance à la décision rendue par la
Cour dans Canadian Bar Insurance Association v. H.M.Q., 99 DTC 653. Dans
cette décision-là, le juge Mogan a conclu que l’Association d’assurances du
Barreau canadien (« AABC ») était admissible à l’exonération prévue à
l’alinéa 149(1)l) applicable aux entités à but non lucratif. Il ressort clairement des
motifs que l’AABC offrait aux avocats canadiens une vaste gamme de produits
d’assurance à des taux stables et raisonnables, et ce, en tant que membre de
l’industrie compétitive de l’assurance commerciale.
[20] L’intimée soutient que l’expression « toute autre activité non lucrative » veut
dire que la constitution et l’administration de l’entité ne peuvent pas être liées à
une activité commerciale ou à une activité d’entreprise. La Couronne, en
appliquant une telle exigence, soutient que l’appelante ne peut pas y satisfaire étant
donné qu’elle exerce ses activités de mesure de cote d’écoute au profit des
membres, qui utilisent ces renseignements dans le cadre de leurs entreprises
commerciales. La Couronne souligne qu’elle ne préconise pas que l’expression
« ou exercer toute autre activité non lucrative » doit être interprétée selon le
principe ejusdem generis par rapport aux activités énumérées. De fait, une tellePage : 8
interprétation ne tiendrait pas compte des mots « toute autre ». L’interprétation
avancée par la Couronne diffère du fondement que l’ARC et les tribunaux ont
appliqué jusqu’à maintenant en examinant cette disposition. Toutefois, la
Couronne soutient que, dans presque toutes les décisions publiées qui ont jusqu’à
maintenant été rendues, il s’agissait de cas dans lesquels la fin pour laquelle
l’organisation était constituée et administrée comportait un certain élément de bien
public, et que les activités en cause visaient à assurer le financement du bien-être
social, communautaire ou public qui constituait le but de l’organisation. La
Couronne reconnaît qu’il est plutôt difficile de concilier la décision Canadian Bar
Insurance Association, précitée, et la nouvelle thèse qui est avancée. Comme nous
le verrons ci-dessous, je crois qu’il est également plutôt difficile de concilier
pleinement la décision rendue par la Cour dans Gulf Log Salvage Co-operative
Association v. M.N.R., 60 DTC 239, et une telle interprétation.
IV. Analyse
[21] Il faut interpréter l’expression « [...] constitué et administré uniquement pour
[...] exercer toute autre activité non lucrative [...] » dans son contexte en suivant le
sens ordinaire qui s’harmonise avec l’esprit et l’objet de la Loi ainsi qu’avec
l’intention du législateur. En d’autres termes, la Cour devrait appliquer l’exception
telle qu’elle est libellée, à condition que cela soit conforme à la disposition lue
dans son contexte et que cela ne contrecarre pas et ne dénature pas l’objet de la
disposition. Voir A.Y.S.A. Amateur Youth Soccer Association v. Canada Revenue
Agency, 2007 DTC 5527 (C.S.C.), paragraphe 16, et Klassen v. H.M.Q.,
2007 DTC 5612 (C.A.F.), paragraphe 17.
[22] En se demandant si le mot « profit » (« lucrative ») peut être interprété de la
façon proposée par la Couronne, je me rends bien compte du fait que ce mot a un
sens commercial ordinaire, et un sens en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu
qui, comme il en sera ci-dessous fait mention, s’entend généralement dans chaque
cas du revenu net réalisé une fois les dépenses déduites.
[23] Le Canadian Oxford Dictionary définit le mot « profit » en ces termes :
[TRADUCTION] « 1. gain financier; excédent du rendement sur les débours;
2. avantage ou bénéfice. » Le Compact Oxford English Dictionary définit ce mot
de cette manière : [TRADUCTION] « 1. gain financier, en particulier différence entre
un débours initial et le montant ultérieurement gagné; 2. avantage; bénéfice. » Le
Larousse de poche définit « lucratif-ive » comme voulant dire « qui procure un
gain ». Le Petit Robert le définit comme voulant dire « qui procure un gain, des
profits, des bénéfices ». Dans ces définitions, il n’est pas expressément faitPage : 9
mention du fait que le gain résulte d’une activité se rattachant à un commerce ou à
une entreprise.
[24] L’occurrence la plus significative du mot « profit » (« bénéfice ») dans la
Loi se trouve au paragraphe 9(1), dans lequel le revenu qu’un contribuable tire
d’une entreprise ou d’un bien pour une année est défini comme étant le bénéfice
qu’il en tire pour cette année. Le mot « profit » ou « bénéfice » n’est pas défini
dans la Loi, mais les tribunaux l’ont toujours interprété comme s’entendant de la
différence entre les sommes reçues au cours d’une période et les dépenses
engagées en vue de gagner ces sommes. Voir par exemple les décisions Canderel
Ltd. v. H.M.Q, 98 DTC 6100, et M.N.R. v. Irwin, 64 DTC 5227, de la Cour
suprême du Canada, M.N.R. v. Anaconda American Brass Ltd., 55 DTC 1220, du
Comité judiciaire du Conseil privé, et Associated Investors of Canada Ltd. v.
M.N.R., 67 DTC 5096, de la Cour de l’Échiquier. Dans l’arrêt Woodward’s
Pension Society v. M.N.R., 62 DTC 1002, page 1004, la Cour suprême du Canada a
clairement donné une telle interprétation au mot « profit », en examinant la
disposition qui s’appliquait avant que l’alinéa 149(1)l) soit édicté. C’est ce qui
ressort également des motifs prononcés par le président Thorson, de la Cour de
l’Échiquier, 59 DTC 1253, page 1260.
[25] Le sens commercial et comptable du mot « profit » est similaire.
[26] Une autre considération textuelle est que la thèse de la Couronne, selon
laquelle le mot en question s’entend d’une fin non commerciale ou non associée à
une entreprise, impliquerait que le mot « entreprise » serait utilisé dans un sens
différent de celui qui lui est attribué au paragraphe 248(1), pour l’application de la
Loi de l’impôt sur le revenu. L’entreprise est définie comme comprenant des
activités de quelque genre que ce soit. Par conséquent, un grand nombre d’entités
exonérées d’impôt exploitent une entreprise, au sens attribué à ce mot dans la
définition.
[27] La considération textuelle finale est que la tentative que la Couronne fait
pour concilier la jurisprudence portant sur l’alinéa 149(1)l) avec la position qu’elle
adopte dans ce cas-ci lorsqu’elle affirme que les décisions en question se
rapportaient toutes à des organisations travaillant dans une certaine mesure pour le
bien public exigerait une interprétation étrange du mot « uniquement » figurant à
l’alinéa 149(1)l), lequel qualifie clairement la fin pour laquelle l’entité est
constituée et administrée.Page : 10
[28] Passant maintenant à une considération contextuelle de l’argument de la
Couronne voulant que le membre de phrase « pour [...] toute autre activité non
lucrative » s’entende de toute activité qui n’est pas liée à une activité commerciale
ou à une activité d’entreprise, je tiens bien compte du fait que les exonérations
d’impôt prévues à l’article 149 et celles qui sont accordées aux organismes de
bienfaisance enregistrés visés à l’article 149.1 s’appliquent à des entités qui
exploitent dans une certaine mesure un commerce ou une entreprise.
[29] L’article 149.1 est clair et explicite lorsqu’il interdit ou restreint les activités
d’entreprise. L’article 149.1 permet à un organisme de bienfaisance d’exercer des
activités commerciales complémentaires. Dans ce contexte, l’activité commerciale
complémentaire est définie comme comprenant une activité commerciale étrangère
aux fins de l’organisme de bienfaisance dans certaines circonstances.
[30] De même, les entités exonérées d’impôt énumérées au paragraphe 149(1)
comprennent certaines entités dont les activités sont de nature commerciale,
notamment les organisations agricoles, les boards of trade ou les chambres de
commerce, les sociétés d’habitation, les organisations ouvrières, les compagnies
d’assurance mutuelle, les assureurs d’agriculteurs et de pêcheurs, les fiducies
établies à des fins d’indemnisation ou assurant le paiement des indemnités de
vacances, ainsi que les associations de secours mutuel exploitant une entreprise
d’assurance-vie.
[31] Il existe au moins deux décisions de la Cour qui seraient incompatibles avec
la position que la Couronne prend en l’espèce, à savoir que l’objet d’une
organisation ne peut pas comprendre un objet qui ne consiste pas à servir le bien
public ou qui se rattache à un commerce ou à une entreprise.
[32] Dans l’affaire Canadian Bar Insurance Association, précitée, l’organisation
s’occupait de vendre divers produits d’assurance à des avocats. Ces produits
comprenaient une assurance-vie et une assurance-invalidité, cette dernière
prévoyant notamment le paiement d’une indemnité pour les dépenses d’entreprise
supportées en période d’invalidité. L’organisation offrait ces produits dans le
secteur concurrentiel des sociétés d’assurance commerciale; le juge Mogan a dit
que l’AABC se livrait sans aucun doute à un grand nombre d’activités
commerciales, mais il a conclu qu’un « haut niveau d’activité commerciale ne
prouve pas en soi que l’appelante exerçait une activité lucrative ». Le juge a
ensuite conclu que la tentative de l’AABC d’offrir au prix coûtant des produits
d’assurance à la collectivité juridique n’était pas un prétexte visant à éviter le
paiement de l’impôt afférent à une entreprise commerciale, mais qu’il s’agissait dePage : 11
l’objet réel de l’AABC. Dans le cas de BBM, rien ne donnait à entendre que ses
membres essayaient de créer un stratagème en vue d’éviter d’être assujettis à
l’impôt à l’égard de leurs entreprises commerciales en payant des frais
d’abonnement ou des droits déductibles, ou à l’égard des activités de BBM
elle-même. L’objet véritable de BBM correspondait à ce qui était énoncé dans ses
lettres patentes.
[33] Dans l’affaire Gulf Log Salvage, précitée, il était clair que l’entité avait
notamment été établie afin de dissuader les profiteurs privés de récupérer les
grumes qui s’étaient éloignées d’estacades appartenant à des scieries et de les
vendre à leur profit aux dépens des propriétaires.
[34] Dans ces deux décisions, il n’est pas soutenu que, pour qu’il soit satisfait à
l’exigence relative à l’exercice de « toute autre activité non lucrative », l’entité ne
peut pas exercer une activité dont l’objet se rattache à une activité commerciale ou
à une activité d’entreprise de ses membres. À coup sûr, dans les deux affaires en
question, Canadian Bar Insurance Association et Gulf Log Salvage, précitées, il
était impossible de satisfaire à cette exigence.
[35] Je ne puis donner au mot « profit » (lucrative) le sens forcé et artificiel
préconisé par la Couronne (i) lorsqu’il n’y a pas d’ambiguïté ni d’incohérence dans
le libellé utilisé, (ii) qu’il ne serait pas approprié de le faire, compte tenu du
contexte et (iii) que le libellé utilisé peut donner lieu à une application raisonnable
fondée sur son sens tel qu’il est ordinairement compris, comme le montrent des
décisions telles que Canadian Bar Insurance Association et Gulf Log Salvage,
précitées.
[36] La Couronne se demande pourquoi la Loi de l’impôt sur le revenu devrait
accorder une exonération d’impôt à une entité à but non lucratif dont l’objet est
rattaché aux activités commerciales ou aux activités d’entreprise de ses membres.
Cela pourrait être une question valable si le libellé de la disposition était ambigu,
incohérent ou imprécis et, par conséquent, s’il ne pouvait pas s’appliquer d’une
façon raisonnable. Or, ce n’est pas ici le cas, de sorte que je ne puis considérer
comme faisant implicitement partie de la disposition en question une exigence
relative à un objet d’intérêt public qui ne s’y trouve pas. Si le fisc ne peut pas ou ne
veut pas convaincre le ministère des Finances de proposer au législateur de
modifier la loi, il ne doit pas s’adresser à la Cour en espérant que, sous le prétexte
d’interpréter la loi, cette dernière usurpera la compétence exclusive que possède le
législateur en matière de rédaction des lois.Page : 12
[37] La Cour suprême du Canada prévient constamment les tribunaux qu’ils ne
doivent pas se fonder sur des notions de politique ou de principe qui ne sont pas
exprimées, et qu’ils ne doivent pas élaborer pareilles notions, sous le couvert
d’interprétation législative, lorsqu’ils ont à appliquer les dispositions de la Loi de
l’impôt sur le revenu. S’ils le faisaient, cela donnerait lieu à une incertitude
intolérable dans l’application de la Loi; or, la question devrait être laissée au
législateur. Voir, par exemple, 65302 British Columbia Ltd. v. H.M.Q.,
99 DTC 5799 (C.S.C.), et Shell Canada Limited v. H.M.Q., 99 DTC 5669 (C.S.C.).
Plus récemment, dans l’arrêt Canada Trustco Mortgage Co. v. Canada,
2005 DTC 5523, la Cour suprême du Canada, dans un jugement unanime, a dit ce
qui suit, au paragraphe 11 :
Lorsque le législateur précise les conditions à remplir pour obtenir un résultat
donné, on peut raisonnablement supposer qu’il a voulu que le contribuable
s’appuie sur ces dispositions pour obtenir le résultat qu’elles prescrivent.
[38] Bref, la Couronne, en prenant la position selon laquelle, parce qu’elle ne
croit pas que la manière dont la Cour applique la disposition en cause soit sage
compte tenu de la façon dont elle considère l’objet de la disposition, il est temps
pour la Cour d’adopter une « interprétation » nouvelle et différente de l’expression
« constitué et administré uniquement pour [...] exercer toute autre activité non
lucrative », fait face à un seuil très élevé qu’elle n’est pas, à mon avis, en mesure
de franchir. Les mots employés dans cette disposition, en particulier l’expression
« non lucrative », sont clairs; ils ont un sens reconnu, et les tribunaux ont pu les
appliquer dans des cas similaires.
[39] La Couronne soutient que l’appelante est uniquement assujettie à l’impôt
prévu à la partie I de la Loi pour l’année 1996 parce qu’elle a choisi de dresser son
budget selon une formule de recouvrement anticipé des coûts. Selon la Couronne,
l’appelante, si elle menait ses activités selon une formule de recouvrement des
coûts exacts, en récupérant de fait les coûts en tant qu’arriérés, ou pertes, n’aurait
pas à payer un impôt en vertu de la partie I, et ce, même si elle n’était pas
admissible à l’exonération prévue à l’alinéa 149(1)l). Je ne vois pas en quoi cette
observation étaye la position de la Couronne. Dans une certaine mesure, cela
montre pourquoi la Cour ne devrait pas se laisser tenter par la position de la
Couronne, lorsque cette dernière affirme que la Cour devrait entreprendre ou
exiger une révision importante de la façon dont les autorités et les tribunaux
fiscaux canadiens ont appliqué l’exonération accordée aux organisations à but non
lucratif au cours des 90 dernières années. La Couronne affirme que la Cour devrait
adopter une approche tout à fait nouvelle, et ce, bien que l’adoption de celle-ci nePage : 13
changerait pas grand-chose, ou ne changerait rien pour l’appelante ou pour le
secteur des organismes à but non lucratif s’ils modifiaient simplement leurs
pratiques en ce qui concerne l’établissement du budget ou la comptabilité.
[40] Selon la position prise par la Couronne, une entité est établie et administrée
pour exercer une activité non lucrative uniquement si elle utilise son revenu afin de
promouvoir un objet d’intérêt public quelconque. Il ne semble pas approprié pour
la Cour d’ajouter un critère d’affectation de fonds ou une condition relative à
l’existence d’un objet donné, comme cela est préconisé par la Couronne. Dans
l’arrêt Earth Fund v. M.N.R., 2003 DTC 5016 (C.A.F.), la Cour d’appel fédérale a
rejeté l’application d’un critère d’affectation de fonds qui aurait permis de décider
quels sont les objets admissibles pour les organismes de bienfaisance. Dans la
décision Otineka Development Corporation Limited v. H.M.Q., 94 DTC 1234
(C.C.I.), page 1237, le juge Bowman (tel était alors son titre) a rejeté l’application
d’un critère d’affectation des fonds visant à permettre de découvrir les objets
admissibles d’entités à but non lucratif. C’est ce que la Cour suprême du Canada
avait antérieurement fait dans l’arrêt M.N.R. v. St. Catharines Flying Training School
Ltd., 55 DTC 1145. Voir également Gull Bay Development Corporation v. H.M.Q.,
84 DTC 6040 (C.F. 1re inst.) et Tourbec (1979) Inc. v. M.N.R., 88 DTC 1439 (C.C.I.).
Si le critère d’affectation des fonds n’établit pas de ligne de démarcation claire pour
qu’une entité soit considérée comme un organisme de bienfaisance ou pour qu’une
entité soit reconnue à titre d’organisme à but non lucratif exonéré d’impôt, je ne vois
pas pourquoi il jouerait ce rôle lorsqu’il s’agit d’empêcher des entités à but non
lucratif d’obtenir une exonération d’impôt.
[41] Il y a un certain nombre d’autres organismes canadiens à but non lucratif qui
œuvrent dans des domaines se rapportant d’une façon ou d’une autre à une
entreprise ou à un commerce. En outre, le même sens est essentiellement attribué à
un « organisme sans but lucratif » dans les dispositions relatives à la TPS de la Loi
sur la taxe d’accise. Je remarque que, dans la décision que le juge en chef Bowman
vient de rendre dans l’affaire Association canadienne de protection médicale
c. Canada, 2008 CCI 33, [2008] A.C.I. no 162 (QL), il est clair que l’ACPM est
une entité dont les activités se rattachent aux activités d’entreprise ou aux activités
commerciales d’autres personnes; pourtant, dans l’exposé conjoint des faits qui a
été déposé dans cette affaire-là, la Couronne a reconnu qu’il s’agissait d’un
« organisme sans but lucratif » aux fins de la TPS, et la chose n’est pas contestée.
De même, je constate que, dans l’arrêt qu’elle vient de rendre dans M.N.R. v.
Greater Montreal Real Estate Board, 2007 DTC 5740, la Cour d’appel fédérale a
confirmé que les chambres immobilières sont également communément établies à
titre de sociétés sans capital-actions à but non lucratif. Je soupçonne qu’il en est dePage : 14
même pour un grand nombre d’organismes de promotion du commerce. Tout cela
confirme qu’il serait peu judicieux à ce stade de l’affaire de se lancer dans une
révision importante de la loi comme le demande la Couronne. Si la Couronne croit
qu’une telle révision est nécessaire, il faudrait le faire au moyen d’une
modification législative, qui ne serait effectuée qu’après un examen de la nécessité
de cette modification par des personnes responsables de la politique fiscale, qui
connaissent le secteur dans toute son étendue plutôt que d’avoir simplement un
aperçu de l’année d’imposition 1996 de l’appelante, et qui connaissent toutes les
répercussions fiscales éventuelles indépendamment de l’application de
l’alinéa 149(1)l) de la Loi de l’impôt sur le revenu. L’examen en question ouvrirait
également la porte à la tenue de consultations. Les Canadiens, la société
canadienne, les provinces et le secteur des organismes à but non lucratif le méritent
bien.
[42] Je ne retiens pas la position de la Couronne lorsqu’elle affirme que l’activité
« lucrative » s’entend essentiellement d’une activité liée au commerce ou à une
entreprise, mais je dois décider si l’appelante satisfait aux exigences de
l’alinéa 149(1)l), eu égard aux faits qui ont été présentés et dont les parties ont
convenu. Deux exigences cruciales sont énoncées à l’alinéa 149(1)l). La première
est que l’organisation doit être constituée et administrée uniquement pour exercer
une activité non lucrative. La seconde est qu’aucun revenu de l’organisation ne
doit être payable à un membre, à un propriétaire ou à un actionnaire, ou ne peut
servir au profit personnel de ceux-ci. La Couronne reconnaît qu’il est satisfait à
cette seconde exigence.
[43] La première exigence, à savoir que l’organisation doit être constituée et
administrée uniquement pour exercer une activité non lucrative, établit un critère
préliminaire très rigoureux. De même, la disposition en question exige que l’accent
soit mis sur l’objet de l’entité et non simplement sur ses activités.
[44] Il s’agit d’exigences rigoureuses fort strictes, qui permettent peut-être un
examen très large de l’objet d’une organisation, mais l’analyse peut être
considérablement simplifiée du fait que le texte législatif n’exige pas qu’une
organisation ait un objet admissible, mais qu’il permet simplement à l’organisation
d’exercer toute activité autre que celle ayant pour objet la réalisation d’un bénéfice.
[45] La jurisprudence à ce jour est en général fort cohérente, en ce qui concerne
les circonstances dans lesquelles une entité ne satisfait pas à la première exigence.
Il ressort clairement de décisions telles que Woodward’s Pension Society, Otineka
et Tourbec, précitées, qu’une entité n’a pas droit à l’exonération prévue àPage : 15
l’alinéa 149(1)l) si elle n’est pas en mesure d’accomplir les objectifs pour lesquels
elle a été établie, à moins de réaliser des bénéfices lui permettant de les accomplir.
Dans l’affaire Woodward’s Pension Society, précitée, l’entité ne pouvait pas aider
à financer des prestations de pension à moins de faire un bénéfice en concluant ses
opérations sur titres. Dans l’affaire Tourbec, l’entité ne pouvait pas offrir des
voyages à des étudiants à un prix inférieur au prix coûtant à moins de faire un
bénéfice sur les ventes conclues avec d’autres. Dans l’affaire Otineka, précitée,
l’entité ne pouvait pas financer d’autres organisations autochtones à moins de faire
un bénéfice sur ses activités d’aménagement immobilier. Or, BBM ne se trouve
pas dans une situation de ce genre et elle satisfait à ce critère préliminaire.
[46] L’ARC est depuis longtemps d’avis, comme elle l’indique dans le bulletin
d’interprétation IT-496, intitulé « Organisation à but non lucratif », que certaines
choses, comme le fait de réaliser des bénéfices importants ou d’accumuler des
réserves déraisonnables, peuvent indiquer l’existence d’un objet lucratif non
déclaré. D’autres considérations pertinentes énoncées dans le bulletin sont de
savoir si les activités de l’entité sont exercées selon les pratiques commerciales
ordinaires, si les biens et services sont vendus à des non-membres, si l’entité est
exploitée sur une base de profit plutôt que selon une formule de recouvrement des
coûts et si elle fait concurrence à des entités imposables qui exploitent le même
genre de commerce ou d’entreprise. Je suis d’accord pour dire que, dans les cas qui
s’y prêtent, il peut s’agir de considérations raisonnables et pertinentes, bien que ces
considérations ne puissent pas toutes être des exigences, mais il faut soupeser
d’une façon appropriée ces considérations eu égard aux circonstances de chaque
affaire, et aucune considération ne sera à elle seule déterminante. Toutefois, en
l’espèce, l’examen de ces considérations ne m’amène pas à conclure que BBM a
un objet lucratif non déclaré.
[47] La Couronne a reconnu que le montant des réserves de BBM sur un certain
nombre d’années était raisonnable par rapport au montant dont celle-ci avait besoin
pour ses activités.
[48] BBM exerce ses activités selon une formule de recouvrement des coûts à
moyen et à long terme, même si elle n’y a pas recours chaque année. Si les
réserves sont raisonnables par rapport à ses besoins, cela veut dire qu’elles seront
utilisées dans un délai raisonnable.
[49] Si les réserves d’une organisation sont raisonnables et si cette organisation
exerce ses activités selon une formule de recouvrement des coûts, on peut
difficilement dire qu’elle fait de gros bénéfices.Page : 16
[50] BBM ne vend ses données qu’à ses membres. Or, il serait difficile d’imputer
un but lucratif à une organisation qui ne conclut des ventes qu’avec ses membres,
selon une formule de recouvrement des coûts.
[51] Bien que la preuve ait révélé qu’un certain nombre de concurrents
commerciaux sont entrés sur quelques-uns des marchés sur lesquels la présence de
BBM était déjà bien établie, ces derniers n’ont jamais essayé de faire concurrence
à BBM à l’échelle nationale, qui est sa véritable vocation.
[52] Il faut se montrer circonspect en ce qui concerne la considération
mentionnée dans le bulletin selon laquelle on doit se demander s’il s’agit d’une
entreprise ou d’un commerce administré comme une entité commerciale ordinaire.
En l’espèce, la Couronne a souligné qu’au cours des années 90, BBM avait produit
plusieurs rapports et notes de service internes dans lesquels était soulignée la
nécessité de créer une culture d’entreprise au sein de BBM et d’exercer les
activités de façon professionnelle. Avec égards, j’estime que ceci n’est pas
suffisant pour disqualifier une organisation. Il s’agit du langage habituel utilisé
dans les rapports de planification stratégique et les plans d’action. Depuis quelque
temps, on parle plus souvent de l’obligation de « rendre compte aux intéressés ». Il
ne s’agit pas d’un langage propre aux entreprises et au commerce. De fait, il est
rarement nécessaire de rappeler aux entreprises qu’elles doivent adopter des
pratiques professionnelles. C’est le langage des ministères et organismes
gouvernementaux ainsi que des administrateurs judiciaires. C’est au secteur public,
aux administrations gouvernementales et quasi gouvernementales ainsi qu’aux
secteurs à but non lucratif et aux organismes de bienfaisance qu’il faut rappeler
qu’ils doivent exercer leurs activités et fournir leurs services de façon
professionnelle.
[53] Un attribut important des entreprises commerciales est absent de la manière
dont sont administrées les entités à but non lucratif telles que BBM. Il n’existe
aucune possibilité pour leurs actionnaires, pour leurs membres ou les personnes qui
les contrôlent de tirer parti des activités de l’entité sur le plan financier, au moyen
de bénéfices, de la distribution de sommes d’argent, de salaires illimités, de
l’appréciation du capital ou des actifs de l’entreprise, ou de quelque autre façon
similaire.
[54] Même si je rejette la position que la Couronne a prise en l’espèce, il n’est
pas surprenant ni inhabituel de constater que les activités de nombreuses
organisations qui sont exonérées d’impôt en vertu de l’alinéa 149(1)l) sont dansPage : 17
une certaine mesure exercées pour le bien public ou pour une fin publique. Dans le
cas de BBM, la valeur des données de mesure nationale qu’elle fournit à ses
membres qui ne font pas partie du monde des affaires, et pour les organismes
gouvernementaux ou quasi gouvernementaux en particulier, est révélatrice de son
importance lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre et de réglementer comme il se doit
les objectifs de la politique canadienne dans le domaine de la diffusion sur les
ondes publiques du Canada. Toutefois, le bien public ou une fin publique ne
constituent pas une condition de l’admissibilité à l’exonération prévue à
l’alinéa 149(1)l). Le fait qu’il existe une fin publique ou que le bien public soit en
cause est au mieux contestable dans le cas des clubs de golf et des clubs sportifs,
des clubs sociaux et des clubs de restauration, qui sont bien souvent des
organisations privées, des associations condominiales et des associations de
propriétaires, des organisations de défense des droits, ainsi que dans le cas de
multiples organisations canadiennes similaires qui se fondent sur cette exonération.
[55] Les appels seront accueillis avec dépens.
[56] Les faits de l’affaire soulèvent une question intéressante au sujet de la
charge de la preuve, sur laquelle je dois faire certaines remarques même si je suis
arrivé à ma décision sans avoir à donner à l’une ou l’autre partie l’avantage de voir
imposer la charge de la preuve à son adversaire. Le présent appel se rapporte à une
nouvelle cotisation concernant l’année d’imposition 1996 de BBM. BBM s’est
opposée à cette cotisation et l’ARC l’a ratifiée. BBM a ensuite déposé son avis
d’appel dans la présente instance. L’ARC a par la suite établi de nouvelles
cotisations à l’égard de plusieurs années d’imposition ultérieures de BBM. Lorsque
BBM a fait opposition, l’ARC y a fait droit. Étant donné qu’en l’espèce, la preuve
indique que rien n’avait changé pour ces années-là, on peut se demander ce que fait
l’ARC. Il arrive souvent que l’ARC établisse une cotisation favorable à un
contribuable pendant bien des années et qu’elle établisse ensuite une nouvelle
cotisation défavorable; aucune fin de non-recevoir ni aucun autre principe ne
peuvent être invoqués en vue de prévenir la chose, et ce, à bon droit. De même, il
ne serait pas surprenant de constater que l’ARC établit par la suite une cotisation
favorable au contribuable, si la nécessité de tenir compte du changement au cours
des années ultérieures n’est pas signalée. Cependant, dansPage : 18
ce cas-ci, l’ARC a établi des cotisations défavorables à l’égard d’années ultérieures
et, après avoir examiné les objections, elle a fait droit à ces dernières et a reconnu
que BBM était exonérée d’impôt en tant qu’entité à but non lucratif. À mon avis,
cela peut avoir pour effet, du moins en pratique, de déplacer vers la Couronne le
fardeau de persuader la Cour ou de lui donner des explications.
Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de juin 2008.
« Patrick Boyle »
Juge Boyle
Traduction certifiée conforme
ce 27e jour de février 2009.
Mario Lagacé, jurilinguisteAPPENDICE
Dossier : 2005-472(IT)G
COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT
ENTRE :
BBM CANADA
(AUTREFOIS BBM BUREAU OF MEASUREMENT),
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
appelante,
intimée.
[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]
EXPOSÉ CONJOINT PARTIEL DES FAITS
L’APPELANTE ET L’INTIMÉE, par leurs avocats respectifs, admettent par les
présentes les faits suivants, pour les besoins de la présente instance seulement :
1. L’appelante, BBM Canada, (« BBM ») est une société fédérale sans capital-actions.
2. Lorsqu’elle a initialement été fondée, le 11 mai 1944, BBM était connue sous le nom de
Bureau of Broadcast Measurement.
3. BBM a été constituée par lettres patentes le 22 janvier 1945.
4. BBM a été fondée par trois secteurs de l’industrie de la radio-télévision : (1) les
diffuseurs; (2) les annonceurs; (3) les agences de publicité.
5. Les trois secteurs de l’industrie ont fondé BBM en vue de procéder à des mesures
impartiales de la diffusion, de la couverture et de l’audience des chaînes de radio et, par la suite,
de l’audience des chaînes de télévision au Canada.
6. Le nom de l’organisation a été changé le 7 juillet 1966, et celui de BBM Bureau of
Measurement a été adopté. Ce jour-là, une nouvelle corporation a été constituée au moyen de
lettres patentes délivrées en vertu de la partie II de la Loi sur les corporations canadiennes.
7. L’objet de BBM, tel qu’il est énoncé dans les lettres patentes, est le suivant :
a) concevoir et mener des sondages, recueillir des données
statistiques et autres, procéder à des études du marché et à d’autres
études se rapportant à la radiodiffusion et à la télédiffusion ainsi
qu’à d’autres formes de supports publicitaires, en particulier en ce
qui concerne le nombre de personnes qui écoutent ou peuventPage : 2
8. 9. 10. 11. 12. 13. écouter des émissions des diverses stations de radio ou qui
regardent ou peuvent regarder des émissions des diverses stations
de télévision ou qui sont exposées à d’autres formes de supports
publicitaires ou qui peuvent être influencées par d’autres formes de
supports publicitaires de temps en temps, à différents moments,
ainsi qu’en ce qui concerne la distribution et les habitudes
d’écoute, de visionnement et de lecture de pareilles personnes;
b) établir des rapports, des diagrammes et d’autres formes de
renseignements fondés sur des sondages ainsi que des données
statistiques et autres qui sont recueillies comme il en est ci-dessus
fait mention, et les imprimer, les publier et les distribuer aux
membres.
Les lettres patentes prévoient également ce qui suit :
Il est en outre ordonné et déclaré que les activités de la corporation
seront exercées sans que ses membres en retirent un gain
pécuniaire, et que tout bénéfice ou autre accroissement du revenu
de la corporation servira à promouvoir son objet.
Le 7 mars 2002, BBM Bureau of Measurement a changé de nom pour adopter celui de
BBM Canada.
De l’avis du ministre, BBM n’est pas un organisme de bienfaisance au sens attribué à
cette expression au paragraphe 149.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.
Au cours de son année d’imposition 1996, BBM n’était pas constituée ni administrée
uniquement pour assurer :
a) le bien-être social;
b) c) d) f) le bien-être de la communauté;
la fourniture d’aide à des groupes défavorisés de la communauté;
le bien commun et le bien-être général de la communauté;
e) les améliorations locales;
la revalorisation de la communauté ou l’amélioration de la qualité de la vie
civique;
g) les loisirs;
h) les divertissements;
i) le plaisir ou l’agrément de la communauté.
Pendant toute la période pertinente en ce qui concerne le présent appel, BBM exerçait ses
activités afin de promouvoir l’objet énoncé dans ses lettres patentes.
Pendant toute la période pertinente en ce qui concerne le présent appel, BBM établissait
des rapports, des diagrammes et d’autres formes de renseignements et de sondages ainsiPage : 3
14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. 23. 24. 25. que des données statistiques et autres, recueillis conformément à l’alinéa a) de ses lettres
patentes; elle publiait ces documents et les distribuait à ses membres conformément à
l’alinéa b) de ses lettres patentes.
Afin d’obtenir des services de BBM, les organisations de l’industrie de la diffusion
(diffuseurs, annonceurs et agences de publicité) doivent devenir membres de BBM et
payer des frais d’abonnement annuels.
Conformément à l’alinéa 4a) des règlements administratifs de BBM, les membres de
BBM sont composés de quatre groupes différents, dont un n’a pas le droit de voter. Les
trois groupes de membres votants sont : (1) les annonceurs, (2) les agences de publicité et
(3) les radiodiffuseurs et télédiffuseurs, chaque groupe étant défini aux sous-alinéas 4a(i),
(ii) et (iii) respectivement des règlements administratifs de BBM. Le seul groupe non
votant est composé de membres associés selon la définition figurant au
sous-alinéa 4a)(iv) des règlements administratifs de BBM.
Au cours de l’année d’imposition 1996, BBM comptait 689 membres.
BBM est régie par un conseil d’administration composé de membres offrant leurs
services à titre gratuit.
Les données que BBM fournit à ses membres figurent au nombre des facteurs dont
ceux-ci, diffuseurs, annonceurs et agences de publicité, tiennent compte pour prendre
leurs décisions.
Chaque année, BBM enquête auprès de centaines de milliers de personnes de tout âge,
partout au pays, afin de connaître leurs habitudes d’écoute de la télévision et de la radio.
Au cours de l’année d’imposition 1996, BBM avait à son service environ 300 personnes.
Parmi les 300 employés susmentionnés, environ 80 à 90 personnes étaient des employés à
plein temps.
Les autres employés étaient des employés à temps partiel qui s’occupaient du traitement
des données d’enquête, ou des employés à temps partiel qui travaillaient au centre
d’appel.
BBM accomplit son travail de la façon la plus efficiente possible, mais pas
nécessairement « au plus bas coût possible ». Elle cherche avant tout à effectuer des
recherches objectives, impartiales et exactes.
BBM est exploitée de façon à recouvrer les coûts prévus (coûts directs et frais généraux)
auprès de ses membres afin d’accomplir son travail; tout excédent, au cours d’un exercice
donné, le cas échéant, est utilisé pour promouvoir l’objet de BBM.
Il n’y a rien dans les lettres patentes de BBM qui interdise les excédents.Page : 4
26. 27. 28. 29. 30. 31. 32. 33. 34. 35. 36. L’exercice de BBM prend fin le 31 août.
Le 4 juin 1997, BBM a adopté une politique formelle concernant les excédents,
l’autorisant à accumuler un excédent correspondant à six mois de frais d’exploitation
normaux.
Au 30 avril 1997, l’excédent accumulé s’élevait à 6 907 000 $. Au cours de l’exercice
1997, les frais d’exploitation normaux s’élevaient à 14 998 557 $.
La proposition que le conseil d’administration de BBM a adoptée le 4 juin 1997 est
libellée en ces termes : [TRADUCTION] « BBM cherche à accumuler un excédent
correspondant à six mois de frais d’exploitation, ce qui, au niveau actuel d’exploitation,
s’élèverait à environ 7 800 000 $. »
Au cours de son année d’imposition 1995, BBM a accumulé un excédent d’exploitation
de 2 257 931 $ et, au cours de son année d’exploitation 1996, BBM a accumulé un
excédent d’exploitation de 2 181 902 $. Au cours des années d’imposition antérieures et
postérieures aux années 1995 et 1996, BBM a généré des excédents beaucoup moins
élevés ou elle a accusé des déficits.
Au cours des années d’imposition 1995 et 1996, les frais d’exploitation annuels de BBM
s’élevaient à environ 16 millions de dollars.
BBM a utilisé les excédents d’exploitation susmentionnés qu’elle avait générés au cours
des années d’imposition 1995 et 1996 en vue de promouvoir son objet.
Pendant toute la période pertinente dans le présent appel, aucun revenu de BBM n’était
payable à un membre de BBM ou ne pouvait par ailleurs servir au profit personnel d’un
membre de BBM.
BBM est la seule organisation au Canada qui fournit sur demande des services de mesure
d’écoute radio et télévision sur tous les marchés canadiens. D’autres organisations ont de
temps en temps offert de fournir des services de mesure d’écoute sur un nombre restreint
de gros marchés canadiens, mais BBM est la seule organisation qui offre constamment un
service de mesure d’écoute sur tous les marchés canadiens, notamment sur les petits
marchés et sur les marchés éloignés.
Au cours des années d’imposition 1995 et 1996, une entité connue sous le nom de
Nielsen fournissait des services de mesure d’écoute télévision au Canada, mais
uniquement sur quelques gros marchés. L’entité Nielsen ne fournissait nulle part au
Canada de services de mesure d’écoute radio.
Au milieu des années 70, BBM a commencé à étudier les systèmes de mesure
électronique. À ce moment-là, Torpey Controls Ltd. a conçu un prototype pour BBM en
utilisant la circuiterie existante et un intervalle de suppression verticale destiné à êtrePage : 5
37. 38. 39. 40. 41. 42. 43. 44. 45. utilisé pour la télévision. Les essais du prototype ont porté fruit sur le plan technique,
mais il y avait des répercussions pratiques et le coût de mise en œuvre n’a pas été établi.
Les systèmes de mesure électronique étaient coûteux pour BBM et utilisaient une forte
proportion de capital.
En 1989, BBM a procédé à des essais à l’égard de la mesure électronique en utilisant un
système qui avait été mis au point par Les Entreprises Vidéoway Ltée.
BBM a abandonné le projet mentionné au paragraphe précédent pour des raisons d’ordre
technologique et financier ainsi qu’à cause de problèmes de brevet. Comme il en est fait
mention dans les états financiers de 1990 de BBM (note 7), une action en contrefaçon de
brevet a été intentée contre BBM.
En 1989, CTV et la Société Radio-Canada étaient membres de BBM.
En 1993, le conseil d’administration et le personnel de BBM se sont lancés dans un
processus de planification stratégique. À l’automne 1993, l’autorisation de faire connaître
le plan stratégique aux membres de BBM a été accordée.
Le plan stratégique susmentionné a aidé le conseil d’administration et le personnel à
comprendre ce qui était important pour BBM. Le plan stratégique a plus précisément
donné lieu au programme de réduction des coûts d’entreprise de BBM, et notamment à la
« guerre au gaspillage ».
Le plan stratégique susmentionné énonçait les quatre objectifs stratégiques suivants :
a) continuer à être chef de file dans le domaine de la mesure d’écoute radio au
Canada;
b) établir et assurer la prépondérance de BBM dans le domaine de la mesure
d’écoute télévision au Canada;
c) créer une culture d’entreprise;
d) maintenir et encourager l’affinité des membres avec BBM.
Au cours des années 1990, BBM et Nielsen ont entamé des discussions au sujet de la
possibilité de former une coentreprise en vue de fournir un service de mesure
électronique télévision au moyen de sondages menés sur les marchés de diffusion locaux
et régionaux plutôt qu’au moyen d’un sondage national (soit un échantillon de population
relativement petit dispersé à travers le pays).
Les discussions susmentionnées, et l’examen par le Bureau de la concurrence, ont mené à
la signature d’un « accord de spécialisation » (plutôt qu’à une coentreprise) le
1er septembre 1995 entre BBM et une société dont Nielsen était une division. Le Bureau
de la concurrence a exprimé, à titre consultatif, un avis favorable à l’accord de
spécialisation avant la signature de l’accord. L’accord de spécialisation portait sur la
mesure d’écoute télévision et prévoyait ce qui suit :46. 47. 48. 49. Page : 6
a) b) c) d) e) f) BBM devait retirer son service de cahiers d’écoute à Toronto et son service de
cahiers d’écoute sur le marché régional de Québec;
Nielsen pourrait entrer sur les marchés régionaux de Toronto et de Québec et
lancer un service de mesure;
Nielsen devait retirer son service de cahiers d’écoute dans le reste du pays;
Il n’y aurait qu’une seule technique ou méthode basée sur les cahiers d’écoute,
laquelle serait assurée par BBM sur les marchés plus petits partout au pays;
Nielsen pourrait également, à certaines conditions, fournir son service de mesure
sur d’autres marchés tels que ceux de Vancouver et de Montréal;
Une fois les conditions susmentionnées remplies, BBM devait retirer son service
de cahiers d’écoute à Vancouver et à Montréal.
En 1997, BBM a résilié l’accord de spécialisation susmentionné qu’elle avait signé avec
Nielsen, sur le fondement de l’article 4.3 de l’accord, parce qu’elle avait conclu que
Nielsen ne se conformait pas aux dispositions de l’accord.
La Division ComQuest de BBM a été établie en 1992 et elle a été exploitée jusqu’à la fin
de l’exercice 1996. Cette division a accusé une perte nette au cours des cinq exercices où
elle a été exploitée. Au cours de l’année d’imposition 1996, la Division ComQuest a
accusé une perte nette de 24 000 $ et, pour les cinq années au cours desquelles elle a été
exploitée, la Division ComQuest a accusé une perte nette cumulative de 889 000 $.
ComQuest Research Inc. est une filiale à cent pour cent imposable de BBM qui a été
constituée le 3 juillet 1996 et qui a commencé à exercer ses activités le
1er septembre 1996 (exercice 1997). Les actifs fixes de moins de 100 000 $ ont été
transférés, à leur valeur comptable, de la Division ComQuest de BBM à ComQuest
Research Inc. le 1er septembre 1996.
Au cours de chaque année où elle a fait un bénéfice, ComQuest Research Inc. a payé un
impôt sur le revenu. ComQuest Research Inc. n’a jamais versé de dividendes à BBM.Page : 7
FAIT à Toronto (Ontario), le 14 novembre 2007.
WeirFoulds s.r.l.
Avocats de l’appelante
Par : _____________________________
J. Gregory Richards
Avocat de l’appelante
Weir Foulds s.r.l.
Bureau 1600, The Exchange Tower
130, rue King Ouest
C.P. 480
Toronto (Ontario) M5X 1J5
(Tél. : 416-947-5031;
téléc. : 416-365-1876)
FAIT à Ottawa (Ontario), ce 14e jour de novembre 2007.
John H. Sims, c.r.
Sous-procureur général du Canada
Avocat de l’intimée
Par : ________________________
André LeBlanc
Roger Leclaire
Avocats de l’intimée
Ministère de la Justice
Services du droit fiscal
Immeuble de la Banque du Canada
Tour Est, 9e étage
234, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0H8
(Tél. : 613-946-4780;
Téléc. : 613-941-2293)RÉFÉRENCE : 2008CCI341
No DU DOSSIER DE LA COUR : INTITULÉ : LIEU DE L’AUDIENCE : DATE DE L’AUDIENCE : MOTIFS DU JUGEMENT : DATE DU JUGEMENT : COMPARUTIONS :
2005-472(IT)G
BBM Canada (autrefois BBM Bureau of
Measurement)
et
Sa Majesté la Reine
Toronto (Ontario)
Les 19 et 20 novembre 2007
L’honorable juge Patrick Boyle
Le 13 juin 2008
Avocats de l’appelante : Me J. Gregory Richards
Me D. Keith Laushway
Me Nikiforos Iatrou
Me André LeBlanc
Avocat de l’intimée : AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Pour l’appelante :
Nom : J. Gregory Richards
D. Keith Laushway
Nikiforos Iatrou
Cabinet : Weir Foulds s.r.l.
Toronto (Ontario)
Pour l’intimée : John H. Sims, c.r.
Sous-procureur général du Canada
Ottawa, Canada